Le Conseil constitutionnel a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à la conformité à la Constitution de l’article 706-71 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2016-1636 du 1er décembre 2016 relative à la décision d’enquête européenne en matière pénale, relatif à l’utilisation de la visioconférence sans accord du détenu dans le cadre d’audiences relatives au contentieux de la détention provisoire.
Les requérants et les parties intervenantes soutenaient que ces dispositions portaient atteinte, notamment, aux droits de la défense. Ils faisaient valoir que les garanties encadrant le recours à la visioconférence étaient insuffisantes.
Dans une décision du 20 septembre 2019, le Conseil constitutionnel se prononce sur le régime applicable aux demandes de mise en liberté formées par les personnes placées en détention provisoire.
Le Conseil constitutionnel juge que, en prévoyant que, lorsque l’audience porte sur une demande de mise en liberté, l’intéressé ne peut s’opposer à ce que sa comparution personnelle s’effectue par le biais d’un moyen de télécommunication audiovisuelle, les dispositions contestées visent à éviter les difficultés et les coûts occasionnés par les extractions judiciaires. Elles contribuent ainsi à la bonne administration de la justice et au bon usage des deniers publics.
En outre, le Conseil constitutionnel relève que la décision de recourir ou non à un tel moyen de télécommunication audiovisuelle appartient au juge. Celui-ci peut donc toujours privilégier la comparution physique de l’intéressé devant lui s’il l’estime nécessaire. Par ailleurs, l’utilisation de la visioconférence n’est possible que dans le respect de garanties énoncées par l’article 706-71 du code de procédure pénale, dont celle que la communication se tienne dans des conditions garantissant le droit de la personne à présenter elle-même ses observations.
Enfin, en dehors des cas où le transport de la personne détenue paraît devoir être évité en raison de risques graves de troubles à l’ordre public ou d’évasion, l’intéressé a le droit de s’opposer au recours à un moyen de télécommunication audiovisuelle lorsqu’il est statué sur son placement en détention provisoire ou sur la prolongation de cette détention. Cette faculté lui garantit donc la possibilité d’être présenté physiquement devant la chambre de l’instruction appelée à statuer sur sa détention provisoire, dès le début de sa détention, puis à intervalles réguliers, tous les quatre mois en matière délictuelle et tous les six mois en matière criminelle, à chaque prolongation de celle-ci.
Toutefois, le Conseil constitutionnel relève que, en matière criminelle, en application de l’article 145-2 du code de procédure pénale, la première prolongation de la détention provisoire peut n’intervenir qu’à l’issue d’une durée d’une année. Il en résulte qu’une personne placée en détention provisoire pourrait se voir privée, pendant une année entière, de la possibilité de comparaître physiquement devant le juge appelé à statuer sur la détention provisoire.
Il juge pour ce motif que, compte tenu de l’importance de la garantie qui s’attache à la présentation physique de l’intéressé devant la juridiction compétente pour connaître de la détention provisoire et en l’état des conditions dans lesquelles s’exerce le recours à ces moyens de télécommunication, les dispositions contestées portent une atteinte excessive aux droits de la défense.
Les dispositions ainsi déclarées contraires à la Constitution ne sont plus aujourd’hui en vigueur.
La remise en cause des mesures ayant été prises sur leur fondement méconnaîtrait les objectifs de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public et de recherche des auteurs d’infractions et aurait ainsi des conséquences manifestement excessives.
Par suite, le Conseil constitutionnel juge que ces mesures ne peuvent être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité.