Le Conseil constitutionnel a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur le 3° de l’article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016.
Les dispositions contestées portent atteinte :
– au droit de propriété intellectuelle des artistes-interprètes et des producteurs, en les privant de la possibilité de s’opposer à la diffusion de leurs phonogrammes sur une radio par internet ;
– à leur liberté d’entreprendre, du fait des limitations apportées à l’exercice de leur activité économique ;
– à leur liberté contractuelle, en les privant de la possibilité de bénéficier d’une rémunération définie par voie conventionnelle.
Dans une décision du 4 août 2017, le Conseil constitutionnel a déclaré le premier alinéa et la seconde phrase du second alinéa du 3° de l’article L. 214-1 du CPI conformes à la Constitution.
D’abord, il a jugé qu’en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu faciliter l’accès des services de radio par internet aux catalogues des producteurs de phonogrammes et ainsi favoriser la diversification de l’offre culturelle proposée au public. Ce faisant, il a poursuivi un objectif d’intérêt général.
L’extension de la licence légale aux services radiophoniques sur internet permet en effet d’améliorer l’offre culturelle tant quantitativement (les webradios peuvent diffuser davantage de titres) que qualitativement (du fait de la diversité et du renouvellement rendu possibles par l’apparition d’artistes et de producteurs nouveaux).
Ensuite, le Conseil constitutionnel a considéré que les dispositions contestées dispensent de l’obligation d’obtenir l’autorisation préalable des artistes-interprètes et des producteurs seulement pour la communication au public de phonogrammes par des services de radio par internet non interactifs.
L’extension du régime de licence légale opérée par la loi du 7 juillet 2016 demeure en effet limitée : sont seules concernées les radios sur internet non interactives.
En revanche, les titulaires de droits voisins retrouvent leurs droits exclusifs dès lors que la diffusion en ligne est susceptible de concurrencer les exploitations primaires des phonogrammes, c’est-à-dire les ventes physiques de disques, auxquelles s’ajoutent désormais les ventes par téléchargement de fichiers audio et l’écoute en ligne sur abonnement via des plateformes de diffusion en flux ou streaming.
Le Conseil constitutionnel a relevé que les dispositions contestées ne limitent ainsi les prérogatives des titulaires de droits voisins qu’à l’égard des services de radio par internet dont les modalités d’offre et de diffusion sont comparables à celles de la radiodiffusion hertzienne.
Enfin, le Conseil constitutionnel a tenu compte de ce que la mise en uvre des dispositions contestées donne lieu à une rémunération des titulaires de droits voisins, versée par les utilisateurs de phonogrammes – au cas particulier les webradios – en fonction de leurs recettes : le barème et les modalités de versement de cette rémunération sont établis soit par des accords spécifiques à chaque branche d’activité entre les organisations représentatives des artistes-interprètes, des producteurs de phonogrammes et des personnes utilisant les phonogrammes, soit à défaut d’accord, par une commission administrative paritaire.
Le Conseil constitutionnel en a conclu qu’une rémunération équitable est assurée aux titulaires de droits voisins au titre de l’exploitation des phonogrammes.