Une société a mis en place un dispositif destiné à réduire lécart de pratique observé entre le travail prescrit et le travail réel effectué par les salariés au sein de lentreprise.
Un syndicat soutient que ce projet, qui n’a pas donné lieu à consultation des comités détablissement et du comité central détablissement sur le fondement de larticle L. 2323-13 du code du travail, porte une atteinte disproportionnée aux droits des personnes et a fait assigner la société devant le tribunal de grande instance (TGI) de Paris.
Le 15 juillet 2015, ce dernier a fait droit à sa demande, annulant la mise en place du dispositif du boîtier électronique et assorti cette annulation dune mesure dastreinte.
Dans un arrêt du 29 septembre 2016, la cour dappel de Paris a confirmé le jugement.
Elle a rappelé que sagissant de la lutte contre le vol, celle-ci doit obéir à des règles précises concernant la géolocalisation, qui doit être exceptionnelle et ponctuelle et à la demande de la personne concernée. Elle en a déduit que le dispositif est donc conforme à cette exigence, dès lors que la géolocalisation nintervient que dans lhypothèse dun vol signalé par le conducteur du véhicule concerné et après dépôt de plainte, sans que cela permette de tracer le trajet parcouru.
En revanche, elle a indiqué que la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) préconise que les données collectées soient adéquates, pertinentes et non excessives au regard des finalités pour lequel le traitement a été mis en oeuvre et que, concernant la lutte contre le vol, les données de localisation ne remontent quà la déclaration de vol, que leur conservation soit limitée aux strictes nécessités de lenquête et de linstruction du dossier par les autorités compétentes.
La cour dappel a précisé que les données transmises sont conservées pendant toute la durée de location du véhicule, entre 3 et 6 ans selon les véhicules, et durant deux ans pour ce qui concerne léco-conduite, et estimé que ces durées sont excessives au regard de la finalité recherchée.
Elle a ajouté que les salariés ne peuvent désactiver le boîtier électronique lorsquils utilisent en dehors de leur temps de travail un véhicule de fonction ou lorsquils agissent dans lexercice dun mandat électif ou syndical.
Enfin, la cour dappel a souligné quen cas de véhicules partagés, les salariés ne disposant pas dun droit de rectification des informations collectées pourront se voir reprocher, au vu dune consommation importante de carburant, une conduite qui ne sera pas nécessairement la leur, le boîtier mesurant, selon la description du kit remise au CCUES, le nombre de kilomètres parcourus dans la journée, le temps dusage moteur dans la journée et des données déco-conduite (accélération, freinage, etc).
Elle a donc considéré en lespèce que le dispositif porte atteinte de manière disproportionnée aux droits des salariés du fait de la nature et du nombre des informations recueillies par la société, de la durée excessive de conservation des données, de limpossibilité pour les salariés de désactiver le boîtier, compte tenu de la présentation de lobjectif poursuivi par lemployeur à savoir le suivi de sa flotte de véhicules dans un souci de maîtrise des coûts et dallégement des tâches des salariés concernant le relevé du kilométrage.
En revanche, concernant les deux outils destinés à contrôler les bonnes pratiques des salariés dans le cadre des procédures mises en place et de contrôle de la performance, la cour dappel a considéré quaucun des éléments produits ne permet détablir quen mettant en uvre le dispositif, la société a excédé ses prérogatives, découlant du contrat de travail et plus spécialement du lien de subordination, de surveillance et de contrôle des salariés et quelle a porté atteinte aux droits et liberté des salariés de lentreprise.