L’humoriste français Coluche avait conclu avec une société de production des contrats d’enregistrement en tant qu’artiste-interprète et des contrats de cession et d’édition des oeuvres dont il était l’auteur. Après son divorce en décembre 1981, son ex-épouse a reçu, au titre du partage des acquêts de communauté, la totalité des redevances attachées à l’exploitation des enregistrements phonographiques effectués par Coluche en tant qu’interprète entre le 16 octobre 1975 et le 15 mai 1981, ainsi que la totalité des droits d’auteur relatifs aux oeuvres publiées ou déclarées au répertoire des sociétés d’auteurs pendant la même période.
A la suite du décès de l’artiste, ses héritiers ainsi que son ex-épouse ont assigné la société de production, en présence de l’auteur de la musique de certaines des chansons en cause, aux fins de voir juger, d’une part, que 31 enregistrements de Coluche, effectués avant le 16 octobre 1975 et après le 15 mai 1981, relevaient de la succession de ce dernier et que la société était tenue de régler aux héritiers les redevances provenant de la vente des phonogrammes et de l’exploitation de ces enregistrements et, d’autre part, que la société avait manqué à son obligation d’exploiter les oeuvres et enregistrements afférents à la période comprise entre 1993 et 1995, et qu’elle leur devait réparation de ce chef.
La cour d’appel de Paris a rejeté ces demandes au titre de neuf sketches.
Les juges du fond ont retenu que la fixation doit permettre la communication de l’oeuvre au public dans la mesure où ce qui déclenche l’application du droit est un acte d’exploitation. Ainsi, la simple captation du son ne constitue pas selon eux une fixation, dès lors que ce son doit être ensuite travaillé en vue de l’établissement du master permettant la reproduction en nombre. La fixation se définit comme l’acte d’exploitation qui marque le terme des opérations de production, entendues comme un processus de mise en forme technique et artistique impliquant différentes opérations sur divers enregistrements. En conséquence, la date de fixation pour chacun des sketches litigieux est celle du master.
La Cour de cassation censure ce raisonnement dans un arrêt du 12 septembre 2018.
Elle rappelle que selon l’alinéa 1er de l’article L. 212-3 du code de la propriété intellectuelle, sont soumises à l’autorisation écrite de l’artiste-interprète la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa communication au public, ainsi que toute utilisation séparée du son et de l’image de la prestation lorsque celle-ci a été fixée à la fois pour le son et l’image. Elle précise que la fixation est constituée par la première incorporation de la prestation de l’artiste dans un support.