A la suite de la diffusion doffres de collaboration sur des sites internet spécialisés, un homme a postulé auprès d’une société qui utilisait une plateforme web et une application afin de mettre en relation des restaurateurs partenaires, des clients passant commande de repas par le truchement de la plateforme et des livreurs à vélo exerçant leur activité sous un statut dindépendant. Le candidat a effectué les démarches nécessaires en vue de son inscription en qualité dauto-entrepreneur et, au terme dun processus de recrutement, les parties ont conclu un contrat de prestation de services.
Le livreur a saisi la juridiction prudhomale dune demande de requalification de son contrat en un contrat de travail.
La cour d’appel de Paris a rejeté le contredit, dit que le livreur nétait pas lié par un contrat de travail à la société et que le conseil de prudhommes était incompétent pour connaître du litige.
Les juges du fond ont relevé lexistence dun système de bonus et de malus appliqué par la société au coursier. Ils ont estimé que si, de prime abord, un tel système était évocateur du pouvoir de sanction que peut mobiliser un employeur, il ne suffisait pas dans les faits à caractériser le lien de subordination allégué : le coursier nétait lié à la plateforme par aucun lien dexclusivité ou de non-concurrence et restait libre chaque semaine de déterminer lui-même les plages horaires au cours desquelles il souhaitait travailler ou de nen sélectionner aucune sil ne souhaitait pas travailler.
Ce raisonnement est censuré par la Cour de cassation.
Dans un arrêt du 28 novembre 2018, elle rappelle en effet que « lexistence dune relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination quelles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée lactivité des travailleurs ; que le lien de subordination est caractérisé par lexécution dun travail sous lautorité dun employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, den contrôler lexécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. »
Or, en l’espèce, les juges du fond ont constaté dune part, que lapplication était dotée dun système de géolocalisation permettant le suivi en temps réel par la société de la position du coursier et la comptabilisation du nombre total de kilomètres parcourus par celui-ci et, dautre part, que la société disposait dun pouvoir de sanction à légard du coursier. Il en résultait lexistence dun pouvoir de direction et de contrôle de lexécution de la prestation caractérisant un lien de subordination.
Dès lors, en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé larticle L. 8221-6 II du code du travail.