Un site d’actualité français a publié, le 15 novembre 2016, un article accompagné dune interview vidéo dun homme daffaire franco-lybien dans laquelle il affirmait avoir apporté au ministère de lIntérieur, entre fin 2006 et début 2007, trois valises dargent liquide préparé par le gouvernement libyen.
A la suite dune plainte avec constitution de partie civile pour diffamation publique envers un particulier déposée par le directeur de cabinet du ministre de lIntérieur au moment des faits, le parquet a ouvert une information judiciaire et a poursuivi, pour diffamation et complicité de diffamation, le directeur de la publication du site dactualités, les auteurs de larticle et linterviewé devant le tribunal correctionnel.
Le 13 février 2020, le tribunal correctionnel de Paris relaxe le site dactualités mais condamne linterviewé.
Pour déterminer sil y ou non diffamation, le tribunal recherche si larticle relate un fait précis attentatoire à lhonneur ou à la considération, conformément à larticle 29 de la loi sur la presse. Or, il relève que larticle décrit avec précision les conditions et modalités des trois remises dargent et impute à la partie civile « un comportement pénalement répréhensible en ce quil viole les règles en matière de financement des campagnes électorales ». Cela valide le caractère diffamatoire des propos.
Le tribunal constate également que les éléments produits pour justifier les propos des journalistes ne sont que des éléments de contexte sans lien direct avec les faits dénoncés et napportent pas une preuve parfaite, complète et en rapport avec les propos diffamatoires.
Toutefois, le tribunal relève que le sujet de larticle était dintérêt général, que larticle ne faisait que reprendre les termes de linterviewé sans dénaturation et que les journalistes navaient pas à justifier dune enquête sérieuse puisquil sagissait de la retranscription dune interview.
Il en déduit que les journalistes, qui « se sont bornés à retranscrire les propos de [linterviewé], nont pas dépassé les limites admissibles de la liberté dexpression reconnue par larticle 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de lhomme et des libertés fondamentales ».
En conséquence, le tribunal les a renvoyés des fins de la poursuite.
Concernant linterviewé, auteur direct des propos, le tribunal rejette largument de la bonne foi, estimant quil ne bénéficiait pas dune base factuelle suffisante.
Retenant « des éléments de sa personnalité, de ses antécédents judiciaires en matière de presse, et des propos particulièrement graves tenus à lencontre de la partie civile », il le condamne à une amende de 5.000 .
Linterviewé devra également verser 3.000 de dommages et intérêts à la partie civile en réparation de son préjudice moral.