Dans plusieurs articles, un site internet spécialisé dans le suivi de l’endettement des entreprises, consultable par abonnement, a rendu compte de l’évolution des procédures en cours et exposé les négociations engagées avec les créanciers des sociétés d’un groupe ayant fait lobjet dun mandat ad hoc puis dune conciliation sur le fondement des articles L. 611-3 et L. 611-5 du code de commerce, citant des données chiffrées sur la situation financière des sociétés.
Plusieurs sociétés du groupe ainsi que le conciliateur ont assigné l’éditeur du site devant le juge des référés pour obtenir le retrait de l’ensemble des articles contenant des informations confidentielles les concernant, ainsi que l’interdiction de publier d’autres articles. Le juge des référés ayant fait droit à leur demande, elles ont ensuite assigné l’éditeur en indemnisation des préjudices subis du fait de la publication des articles litigieux.
La cour d’appel de Versailles a retenu la responsabilité de l’éditeur du site et l’a condamné à payer des dommages-intérêts aux sociétés du groupe.
Les juges du fond ont retenu qu’en divulguant des informations qu’il savait couvertes par la confidentialité sans que cette divulgation soit justifiée par la nécessité d’informer le public sur une question d’intérêt général, l’éditeur avait commis une faute à l’origine d’un préjudice.
Ils ont également estimé que si la question de la résistance des opérations d’achat avec effet de levier (LBO) à la crise et les difficultés que des sociétés ainsi financées peuvent connaître relevait d’un débat d’intérêt général, dont plusieurs journaux s’étaient déjà fait l’écho, mais en se contentant d’informations générales, n’informant le public que de l’existence de procédures en cours, tel n’était pas le cas des informations dont la publication est reprochée au site internet, qui étaient précises et chiffrées et portaient sur le contenu même des négociations en cours et leur avancée, ces informations intéressant, non le public en général, mais les cocontractants et partenaires de ces sociétés en recherche de protection.
Dans un arrêt du 13 juin 2019, la Cour de cassation affirme que de ces constatations et appréciations, la cour d’appel a pu déduire que les informations divulguées n’étaient pas justifiées par un débat sur des questions d’intérêt général et ne contribuaient pas à la nécessité d’en informer le public.
Elle estime en effet que l’effectivité du principe de la confidentialité des informations ne serait pas assurée si l’article L. 611-15 du code de commerce ne conduisait pas à ériger en faute la divulgation, par des organes de presse, hormis dans l’hypothèse d’un débat d’intérêt général, des informations ainsi protégées.