Des sociétés norvégiennes et néerlandaises ont introduit un recours contre une société allemande, au motif que la vente de chaises nommées « Alpha » et Beta » violait leurs droits d’auteur ainsi que les droits tirés d’une marque enregistrée. En effet, ces sociétés avaient introduit une chaise nommée Trip Trap sur le marché dès 1972 et déposé une demande d’enregistrement pour une marque tridimensionnelle en 1998. La société allemande a formé, quant à elle, une demande reconventionnelle, concluant notamment à l’annulation de la marque. En 2000, une juridiction néerlandaise a accueilli le recours contre la société allemande concernant la violation des droits d’auteur tout en annulant, l’enregistrement de la marque comme demandé par la société allemande.
Saisie d’un pourvoi, la Cour suprême des Pays-Bas a posé à la Cour de Justice de l’Union européenne des questions préjudicielles sur les motifs pour lesquels l’enregistrement d’une marque constituée par la forme du produit peut être refusé ou déclaré nul.
Dans ses conclusions du 14 mai 2014, l’avocat général Maciej Szpunar, déclare que la notion de forme « imposée par la nature même du produit » au sens de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des Etats membres sur les marques, concerne la forme dont l’ensemble des caractéristiques essentielles résultent de la nature du produit concerné. Il importe peu que ce produit puisse également revêtir d’autres formes alternatives.
En outre, la notion de forme « qui donne une valeur substantielle au produit » vise la forme dont les caractéristiques esthétiques constituent l’un des principaux éléments décidant de la valeur de marché du produit en cause, tout en constituant l’une des raisons principales pour lesquelles le consommateur décide d’acheter ledit produit. Cette interprétation n’exclut pas que le produit présente d’autres caractéristiques importantes pour le consommateur.
L’avocat général ajoute que la perception du consommateur moyen constitue l’une des circonstances devant être prises en compte pour apprécier l’applicabilité du motif en cause, et parmi celles-ci figurent aussi, notamment, la nature de la catégorie concernée de produits, la valeur artistique de la forme en cause, la spécificité de cette forme par rapport à d’autres formes généralement présentes sur le marché concerné, la différence notable de prix vis-à-vis de produits manufacturés concurrents, ou l’existence d’une stratégie promotionnelle mettant principalement en avant les caractéristiques esthétiques du produit en cause. Aucune de ces circonstances n’est en elle-même décisive.
Enfin, l’avocat général considère qu’un même signe peut être apprécié parallèlement sous l’angle des différents motifs, mais le refus ou la nullité de l’enregistrement d’une marque n’est applicable que lorsque les conditions d’application d’au moins l’un des motifs précités sont pleinement remplies.
04/07/2014