Laffaire concerne le rejet par les tribunaux allemands de la demande formée par un entrepreneur de niveau international aux fins de lobtention dune injonction ordonnant le retrait de la publication de certaines déclarations faites à son sujet dans un article publié dans la version en ligne du New York Times.
Larticle en cause fut publié le 12 juin 2001 dans la version papier du New York Times puis, sous une forme légèrement modifiée, dans lédition en ligne du journal, où il est toujours accessible. Il portait sur une enquête pénale menée aux Etats-Unis contre une entreprise détenue par lancien candidat à la mairie de New York à la suite dallégations selon lesquelles cette entreprise avait versé des pots-de-vin à des responsables ukrainiens pour obtenir une licence de télévision.
Larticle indiquait notamment que, selon le FBI et les services européens dapplication des lois, M. F., qui était lun des propriétaires dune entreprise de radiotélédiffusion sise à Kiev, avait des liens avait le crime organisé russe.
M. F. engagea une action devant les juridictions allemandes afin dobtenir une injonction ordonnant le retrait de la publication de ces déclarations négatives à son égard.
Le tribunal régional de Düsseldorf déclara cette action irrecevable, jugeant quelle ne relevait pas de la compétence des tribunaux allemands puisque lédition papier du New York Times nétait pas distribuée en Allemagne et que la version en ligne du journal navait pas pour cible les lecteurs allemands. Cette décision fut confirmée par la cour dappel mais annulée par la Cour fédérale de justice en 2010 pour autant quelle concernait la demande dinjonction contre les déclarations parues dans lédition en ligne. Sur ce point, la Cour fédérale de justice reconnut la compétence des juridictions allemandes étant donné que lédition en ligne était accessible en Allemagne.
Invoquant larticle 8 (droit au respect de la vie privée et familiale), le requérant se plaignait que les tribunaux allemands aient manqué à protéger sa réputation et son droit au respect de sa vie privée.
Le 19 octobre 2017, la Cour européenne des droits de lHomme (CEDH) a souscrit aux conclusions auxquelles est parvenue la cour dappel allemande dans laffaire du requérant, à savoir que larticle contribuait à un débat dintérêt public, en loccurrence sur la participation soupçonnée dun ancien candidat à la mairie de New York à des actes de corruption, et que, dans ce contexte, limplication alléguée dun homme daffaires allemand, le requérant, dans du trafic dor, du détournement de fonds et des réseaux de crime organisé présentait également un intérêt public, même si les faits allégués dataient de quelques années.
Elle admet également quil y avait un intérêt public à laisser larticle accessible dans les archives en ligne du journal.
La Cour conclut que les tribunaux allemands ont ménagé un équilibre raisonnable entre le droit du requérant au respect de sa vie privée, garanti par larticle 8 de la Convention, et le droit du journal à la liberté dexpression, garanti par larticle 10.
Les déclarations en cause reposaient sur une base factuelle suffisante et larticle qui concernait essentiellement la vie professionnelle de lhomme daffaires ne renfermait ni insinuations ni déclarations polémiques.