En avril et mai 2005, lancien manager dune chanteuse mexicaine, très connue en Espagne, a été interviewé dans le cadre de trois émissions de télévision, sur divers aspects de la vie privée de la chanteuse. Cette dernière a alors formé une action civile tendant à la protection de son droit à lhonneur et à la vie privée contre son ancien manager, des présentateurs et des collaborateurs démissions de télévision et contre des sociétés de production de programmes télévisés et des chaînes de télévision elles-mêmes. Elle se plaignait du contenu de ces émissions, estimant que certains des commentaires effectués dans ces émissions avaient porté atteinte à son droit à lhonneur et au respect de sa vie privée. Ceux-ci portaient essentiellement sur son orientation sexuelle, ainsi que sur la relation orageuse quelle aurait entretenue avec son compagnon, les humiliations quelle lui aurait infligées et son rôle dans sa consommation par lui de stupéfiants.
Après avoir épuisé les voies de recours interne, la chanteuse a saisi la Cour européenne des droits de lHomme (CEDH), qui a fait droit à sa demande, le 21 février 2017, précisant quil y a en l’espèce violation en lespèce de larticle 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention EDH.
La CEDH a en effet précisé que le fait que la requérante soit connue du public en tant quartiste nimplique pas que ses activités ou comportements dans la sphère de sa vie privée puissent être considérés comme relevant nécessairement de lintérêt public. Elle a ajouté quelle est davis que les émissions de télévision en cause, basées sur des aspects strictement privés de la vie de la chanteuse, ne comportaient pas un intérêt public à même de légitimer la divulgation de ces informations, malgré la notoriété de lintéressée, le public nayant pas un intérêt légitime à connaître certains détails intimes relatifs à sa vie privée.
La CEDH a également estimé que le fait que la chanteuse aurait pu tirer profit de lattention de la presse nautorisait pas pour autant les chaînes de télévision à diffuser des commentaires incontrôlés sur sa vie privée. Elle a rappelé que certains événements de la vie privée et familiale font lobjet dune protection particulièrement attentive au regard de larticle 8 de la Convention EDH et doivent conduire les journalistes à faire preuve de prudence et de précaution lors de leur traitement. La CEDH a souligné que le fait de répandre des rumeurs non vérifiées ou de faire des commentaires sans contrôle ni limite sur nimporte quel sujet relatif à la vie dautrui ne doit pas être vu comme anodin. Enfin, elle a conclu quil appartenait aux autorités nationales de procéder à une appréciation des émissions de télévision litigieuses afin de distinguer et de mettre en balance ce qui était susceptible de toucher le cur de la vie privée de la chanteuse et ce qui pouvait présenter un intérêt légitime pour le public.