Un ressortissant turc publia un éditorial intitulé « Yolunuz aç?k olsun » (« Que votre route soit dégagée ») dans lequel il critiquait lassociation des journalistes de Sinop (Turquie) lui reprochant dagir en contradiction avec son objectif principal et de ne plus servir le but pour lequel elle avait été créée. Estimant que larticle de léditorialiste avait porté atteinte à sa dignité et à celle des autres dirigeants de lassociation, le président de lassociation envoya une réponse rectificative, mais léditorialiste refusa de la publier dans son journal.
Le président de lassociation saisit le tribunal de paix de Sinop dune demande dinjonction de la publication de sa réponse. Le juge fit droit à cette demande, statuant sur dossier. Léditorialiste fit opposition devant le tribunal correctionnel de Sinop, lequel rejeta sa demande, statuant à titre définitif sur dossier. Le texte de la réponse rectificative fut publié dans le journal du requérant.
Invoquant les articles 6 (droit à un procès équitable), 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) et 13 (droit à un recours effectif), le requérant se plaignait de labsence daudience devant le tribunal de paix et le tribunal correctionnel, de linsuffisance dexamen devant le tribunal de paix et le tribunal correctionnel, et de limpossibilité de se pourvoir devant une juridiction suprême contre les décisions rendues par ces juridictions. La Cour décide dexaminer ces griefs sous langle de larticle 6 § 1 (droit à un procès équitable).
Invoquant larticle 10 (liberté dexpression), le requérant se plaignait davoir été contraint de publier le texte rectificatif qui, selon lui, portait atteinte à sa réputation et à sa dignité et constituait une ingérence à sa liberté dexpression.
Le 24 octobre 2017, la Cour européenne des droits de lHomme estime quil ny pas de violation de larticle 6 § 1 (droit à un procès équitable) de la Convention européenne des droits de lHomme. La CEDH juge en particulier que dans le cadre de la procédure du droit de réponse rectificative, où les questions de droit ne revêtaient pas de complexité particulière et où les tribunaux internes devaient statuer dune manière rapide, le fait que les juridictions internes aient forgé leur conviction après examen des pièces du dossier et sans la tenue dune audience ne porte pas atteinte aux exigences de larticle 6 § 1 en matière doralité et de publicité.
Elle considère également quil ny a pas eu de violation de larticle 10 (liberté dexpression) de la Convention.
La CEDH estime que les juridictions internes ont ménagé un juste équilibre entre le droit de léditeur dun journal à la liberté dexpression et celui de lassociation des journalistes de Sinop à la protection de sa réputation.
En effet, la CEDH considère que la réponse rectificative ne dépassait pas les limites de la critique admissible et que la mesure de publication était proportionnée au but poursuivi (protection de la réputation et des droits dautrui).
Par ailleurs, léditorialiste na pas été obligé de modifier le contenu de son article et rien ne sopposait à ce quil puisse publier à nouveau sa version des faits.