Le 7 janvier 2012, dans lémission « On nest pas couché », France 2 a diffusé une séquence au cours de laquelle, à lissue de linterview de lun des candidats à lélection présidentielle, ont été montrées des affiches concernant ces candidats, qui avaient été publiées dans l’édition du 4 janvier du journal « Charlie Hebdo ».
Lune de ces affiches représentait un excrément fumant surmonté de la mention « Le Pen, la candidate qui vous ressemble ». La candidate a déposé plainte avec constitution de partie civile en soutenant que cette comparaison constituait, à son égard, linfraction dinjure publique envers un particulier.
Renvoyé devant le tribunal correctionnel du chef de complicité de cette infraction, l’animateur de lémission a été relaxé. Seule la partie civile a interjeté appel.
La cour d’appel de Paris a confirmé le jugement ayant rejeté les demandes de la candidate, estimant que la publication litigieuse ne dépassait pas les limites admissibles de la liberté dexpression.
Dans un arrêt rendu le 25 octobre 2019, la Cour de cassation, réunie en assemblée plénière, indique que pour déterminer si la publication litigieuse peut être incriminée, il y a lieu de rechercher si elle est constitutive dun abus dans lexercice du droit à la liberté dexpression. Elle ajoute que lexigence de proportionnalité implique de rechercher si, au regard des circonstances particulières de laffaire, la publication litigieuse dépasse les limites admissibles de la liberté dexpression, et précise qu’en labsence de dépassement de ces limites, et alors même que linjure est caractérisée en tous ses éléments constitutifs, les faits objet de la poursuite ne peuvent donner lieu à des réparations civiles.
La Haute juridiction judiciaire retient en l’espèce que laffiche, qui a été publiée dans un journal revendiquant le droit à lhumour et à la satire, comporte une appréciation du positionnement politique de Marine Le Pen à loccasion de lélection présidentielle et a été montrée par l’animateur avec dautres affiches parodiant chacun des candidats à lélection présidentielle, dans la séquence dune émission polémique sapparentant à une revue de presse, mention étant expressément faite que ces affiches émanent dun journal satirique et présentent elles-mêmes un caractère polémique.
Enfin, statuant sur la possibilité dinvoquer le caractère attentatoire à la dignité humaine de linjure pour légitimer lingérence dans la liberté dexpression, lassemblée plénière proclame que le principe du respect de la dignité de la personne humaine ne constitue pas un fondement autonome des restrictions à la liberté dexpression.