Le secret des sources face au secret de l’instruction

Droit de la presse - Droit de la vie privée, Droit de la vie privée

Dans le cadre d’une commission rogatoire, des policiers ont effectué une perquisition au domicile et au cabinet d’une avocate qui, suspectée de vol, avait été placée en garde à vue le 22 janvier 2007. Quelques jours après, un journal local ayant publié deux articles faisant état de la garde à vue de l’avocate et portant des précisions sur son déroulement, l’avocate porta plainte des chefs de violation du secret de l’instruction, la procédure n’étant connue que de personnes tenues au secret de l’instruction au moment des publications litigieuses.

Dans le cadre de cette enquête, des réquisitions ont alors été adressées aux opérateurs téléphoniques des journalistes auteurs de l’article afin d’identifier les auteurs de la violation du secret.

La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Bordeaux, dans un arrêt du 9 août 2011, a annulé ces réquisitions au motif que l’atteinte à la protection des sources des journalistes n’était pas justifiée par un « impératif prépondérant d’intérêt public » tel qu’exigé par la loi du 4 janvier 2010, mais qu’elles se fondaient uniquement sur la probabilité de la violation du secret de l’instruction déduite de la succession à délai très rapproché du placement en garde à vue et des informations parues dans la presse. Au surplus, en s’abstenant de demander l’accord des journalistes pour de tels actes, la cour d’appel a jugé que le juge d’instruction avait violé les articles 56-1 à 56-3 du code de procédure pénale instaurant un régime spécial de perquisitions.

La Cour de cassation censure les juges du fond. Dans un arrêt du 14 mai 2013, elle retient « qu’en se déterminant par ces seuls motifs, d’une part, sans mieux s’expliquer sur l’absence d’un impératif prépondérant d’intérêt public alors que la violation du secret de l’instruction reprochée imposait de rechercher les auteurs de cette infraction ayant porté atteinte à la présomption d’innocence, d’autre part, sans caractériser plus précisément le défaut de nécessité et de proportionnalité des mesures portant atteinte au secret des sources des journalistes au regard du but légitime poursuivi, et enfin, en faisant à tort référence à l’obligation d’obtenir l’accord des journalistes pour procéder aux réquisitions litigieuses alors qu’un tel accord n’est nécessaire que si ces professionnels sont directement requis de fournir des informations, la chambre de l’instruction n’a pas justifié sa décision ».

19/06/2013