En Norvège, une avocate réputée a intenté une action en responsabilité civile à l’encontre de l’hébergeur d’un forum sur internet après la publication sur ledit forum de commentaires vulgaires la concernant. Déboutée par les juridictions nationales, elle a formé une requête devant la Cour européenne des droits de l’Homme.
Dans un arrêt du 19 mars 2019, la CEDH rappelle que l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (CESDH) englobe le droit d’une personne à la protection de sa réputation. Elle observe, par ailleurs, que dans le cas d’espèce se trouve en cause non pas un acte de l’Etat mais l’insuffisance alléguée de la protection accordée par les juridictions internes à la vie privée de la requérante. À l’obligation négative découlant de l’article 8 peuvent s’ajouter des obligations positives inhérentes au respect effectif de la vie privée.
Elle observe, ensuite, que le tribunal de première instance a estimé que les commentaires publiés sur la requérante ne pouvaient s’analyser en une diffamation au sens du droit interne, alors que la cour d’appel a jugé qu’il n’était pas nécessaire de trancher la question de savoir s’ils étaient diffamatoires ou non. Elle considère également qu’elle n’est pas tenue d’examiner de manière approfondie la nature des commentaires litigieux en ce qu’il ne s’agit en aucun cas de discours de haine ou d’incitation à la violence.
La CEDH juge par conséquent qu’en s’efforçant de ménager un équilibre entre, d’une part, les droits de la requérante découlant de l’article 8 et, d’autre part, le droit à la liberté d’expression garanti par l’article 10 au portail d’actualités et à l’hébergeur de forums de discussion, les juridictions internes ont agi dans les limites de leur marge d’appréciation.
Bien qu’ayant relevé le montant considérable des frais de justice à la charge de la requérante, la Cour considère que, compte tenu de la nature de la demande formulée devant les juridictions nationales et de l’objet de l’affaire, ce montant n’est pas de nature à remettre en cause l’appréciation des juridictions nationales à cet égard. La Cour est en tout cas convaincue que les droits de la requérante découlant de l’article 8 ont été suffisamment préservés par les juridictions internes et qu’il n’y a pas eu violation de ladite disposition.