La société E. est titulaire de la marque de l’Union européenne « Gallo », enregistrée le 5 octobre 1998, sur demande déposée le 1er avril 1996, sous revendication d’ancienneté de la même marque française enregistrée le 30 août 1968 et restée en vigueur jusqu’au 30 août 1998.
Elle a assigné en contrefaçon de cette marque de l’UE la société S., productrice d’un champagne « Gallo » depuis 1984. Cette dernière lui a opposé la déchéance des droits attachés à chacune de ces marques, ainsi que la nullité, pour atteinte à ses propres droits antérieurs, de celle fondant cette action en contrefaçon.
La cour d’appel de Paris a prononcé la déchéance des droits attachés à la marque française à compter du 30 août 1973.
Dans un arrêt rendu le 26 septembre 2018, la Cour de cassation rejette le pourvoi de la société E.
Elle rappelle en premier lieu, que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a dit pour droit (19 avril 2018, affaire C-148/17) que l’article 14 de la directive 2008/95/CE, lu en combinaison avec l’article 34, § 2, du règlement (CE) n° 207/2009, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une interprétation de la législation nationale selon laquelle la nullité d’une marque nationale antérieure ou la déchéance des droits du titulaire de celle-ci, dont l’ancienneté est revendiquée pour une marque de l’Union européenne, ne peut être constatée a posteriori que si les conditions de cette nullité ou de cette déchéance étaient réunies non seulement à la date à laquelle il a été renoncé à cette marque nationale antérieure ou à la date à laquelle celle-ci s’est éteinte, mais également à la date à laquelle intervient la décision juridictionnelle opérant cette constatation.
Or, le moyen postule, en sa première branche, que la déchéance des droits du titulaire de la marque antérieure s’apprécierait, non pas à la date de la demande en déchéance, mais à celle de la renonciation aux droits attachés à l’enregistrement, ou à celle de leur expiration, pour en déduire, en sa deuxième branche, que le droit national, en ce qu’il ne serait pas conforme à ces principes, devrait être écarté.
La Haute juridiction judiciaire relève, en deuxième lieu, que les juges du fond n’ont pas constaté que la société E. se serait bornée à alléguer une exploitation de la marque française, mais a retenu que cette exploitation n’était pas démontrée.
Elle ajoute, en troisième lieu, que les conclusions d’appel de cette société objectant exclusivement l’irrecevabilité de la demande en déchéance visant la marque française, les juges n’étaient pas tenus de se livrer à une recherche inopérante portant sur son bien-fondé.
Enfin, la Cour considère que, constatant que la marque déposée sous l’empire de la loi du 31 décembre 1964 n’avait jamais été exploitée, la cour d’appel a pu fixer la date d’effet de sa déchéance au 30 août 1973, cinq ans après la publication de son enregistrement.