Deux citoyens allemands ont été reconnus coupables de lassassinat dune célébrité et condamnés à perpétuité. Plusieurs dizaines dannées après, ils ont été libérés avec mise à lépreuve.
Ils ont alors assigné en justice une station de radio allemande en vue dobtenir lanonymisation des données personnelles dans des dossiers les concernant qui avaient paru sur le site internet de la station.
Les juridictions du fond ont accueilli les demandes des requérants mais la Cour fédérale de justice a cassé ces décisions au motif que la cour dappel navait pas suffisamment pris en compte le droit à la liberté dexpression de la station de radio et, en ce qui relevait de sa mission, de lintérêt du public à être informé. La Cour constitutionnelle fédérale na pas admis les recours constitutionnels déposés par les requérants.
Se plaignant du refus de la Cour fédérale de justice dinterdire aux médias assignés de maintenir sur leur portail internet la transcription dune émission de radio et de reportages écrits concernant leur condamnation pour assassinat, les requérants ont saisi la Cour européenne des droits de lHomme (CEDH).
Dans son arrêt du 28 juin 2018, la Cour rappelle que les médias ont pour mission de participer à la formation de lopinion démocratique en mettant à la disposition du public des informations anciennes conservées dans leurs archives.
Elle énonce que la manière de traiter un sujet relève de la liberté journalistique et que larticle 10 de la Convention EDH laisse aux journalistes le soin de décider quels détails doivent être ou non publiés, sous la condition que ces choix répondent aux normes éthiques et déontologique de la profession.
Ainsi, linclusion dans un reportage déléments individualisés, tel que le nom complet de la personne visée, constitue un aspect important du travail de la presse, notamment lorsquil sagit dune procédure pénale ayant suscité un intérêt public. Par ailleurs, la CEDH note quau cours de leur dernière demande de révision du procès, les requérants se sont eux-mêmes tournés vers la presse, lui transmettant un certain nombre de documents et linvitant à en tenir le public informé. Cette démarche affaiblit laccueil favorable de leur demande danonymisation des reportages en cause ou encore un droit à loubli numérique.
De ce fait, compte tenu de la marge dappréciation des autorités nationales lorsquelles mettent en balance des intérêts divergents, de limportance de conserver laccessibilité à des reportages acceptés comme licites et du comportement des requérants vis-à-vis de la presse, la Cour estime quil ny a pas de raisons sérieuses de substituer son avis à celui de la Cour fédérale de justice et quil ny a pas eu violation de la Convention EDH.