Une société américaine nommée France.com Inc. est propriétaire du nom de domaine France.com, enregistré le 10 février 1994. Elle a découvert quune société de droit hollandais avait déposé en 2009 des marques françaises verbale ou semi-figuratives composées par lexpression France.com, en fraude de ses droits. Par acte dhuissier en date du 19 mai 2014, la société américaine a assigné la société hollandaise devant le tribunal de grande instance de Paris en dépôt frauduleux de marques pour en obtenir le transfert ainsi que lindemnisation de son préjudice. Lensemble des marques a été cédé à France.com Inc par leffet dun acte de transaction intervenu avec la société néerlandaise en 2014 et une déclaration de cession a été inscrite auprès de lOffice de l’harmonisation dans le marché intérieur (OHMI) en 2015 (depuis EUIPO – Office de lUnion européenne pour la propriété intellectuelle) en ce qui concerne les enregistrements communautaires ainsi quau Registre national des marques en ce qui concerne les marques françaises.
LEtat français est intervenu volontairement à la procédure pour faire constater notamment latteinte à ses droits sur le nom de son territoire par la société hollandaise et obtenir le transfert à son profit des marques litigieuses, ainsi que latteinte à ses droits par la société France.com Inc et obtenir le transfert du nom de domaine, ou subsidiairement une interdiction de licencier. LEtat français a formé des demandes additionnelles, sollicitant lannulation des cinq enregistrements des marques françaises en litige cédées à la société France.com Inc. et quil soit ordonné à cette dernière de renoncer volontairement auprès de lOHMI aux quatre enregistrements des marques communautaires.
Le 27 novembre 2015, le tribunal de grande instance de Paris a ordonné à la société américaine France.com de transférer à lEtat français, sous astreinte de 150 par jour de retard, passé le délai de deux mois après la signification du jugement, le nom de domaine france.com. La société France.com fait grief au jugement davoir accueilli cette demande et de lui avoir ordonné, sous astreinte, de transférer à lEtat français, les marques en cause pour les produits et services visés à chacun des dépôts.
Le 22 septembre 2017, la cour dappel de Paris confirme le jugement du TGI. Les juges du fond retiennent que, contrairement à ce que soutient lappelante, lappellation « France » constitue pour lEtat français un élément didentité assimilable au nom patronymique dune personne physique. Ce terme désigne le territoire national dans son identité économique, géographique, historique, politique et culturelle, laquelle a notamment vocation à promouvoir lensemble des produits et services visés aux dépôts des marques considérées. Le suffixe « .com » correspondant à une extension internet de nom de domaine nest pas de nature à modifier la perception du signe. Les juges du fond précisent que le grand public identifiera ces produits et services comme émanant de lEtat français ou à tout le moins dun service officiel bénéficiant de la caution de lEtat français. Le risque de confusion est en outre renforcé par la représentation stylisée des frontières géographiques de la France dans les marques complexes en cause.
Toutefois, la cour dappel rejette la décision du TGI en ce quil a ordonné à la société France.com Inc de transférer à lEtat français, sous astreinte de 150 par jour de retard et par marque, passé le délai de deux mois après la signification du jugement, les marques françaises et communautaires France.com. Il appartient à lEtat français de saisir lEUIPO de sa demande en nullité sans quil y ait lieu dordonner à la société France.com de procéder volontairement et sous astreinte à une renonciation totale de ces signes « compte tenu des causes dinvalidité déjà retenues notamment par lEUIPO à lencontre du signe France.com ».